Intégré dans l’Empire de Rome dès la conquête, à partir de 125 avant notre ère, le territoire reste profondément marqué par cette période qui a vu, très vite, s’installer de nombreux Italiens au sein de la population locale de culture celtibérique, déjà métissée et ouverte aux grands échanges européens et méditerranéens.
Dans la plaine littorale, que la légende fait parcourir à Héraclès en lui attribuant l’ouverture de la mythique « voie héracléenne », dont des traces existent sans doute à l’est de Béziers et avant la montée du col du Malpas à Colombiers, la circulation s’est élargie grâce à la construction de la voie Domitienne, grande artère stratégique inaugurée dès la conquête, et qui traverse d’Ouest en Est tout le territoire, où elle a été retrouvée en plusieurs lieux.
Le paysage est remodelé très vite, à partir de ce premier chantier, par les effets des grandes politiques d’aménagement du territoire. C’est au cours du Ier siècle avant notre ère, surtout après la fondation de la colonie romaine de Béziers, en -36, que se dessinent pour les millénaires qui suivent, la carte d’implantation des établissements ruraux et le plan de distribution des habitats.
C’est aussi la période où s’affirme la vocation agricole du Biterrois et où s’imposent des choix économiques qui ne vont plus se démentir. La place motrice acquise dès le début de notre ère par la viticulture crée les grandes lignes d’un paysage culturel, où l’ordre au carré des vignes laisse toute leur place aux champs de céréales, aux olivettes et à la garrigue. Dès lors, la vigne a commencé de marquer l’identité des paysages, dans un équilibre, qu’elle retrouve peu à peu aujourd’hui.
Les étangs, cuvettes souvent creusées par les vents et plus nombreux qu’aujourd’hui, parsemaient les paysages et ont connu les premières tentatives d’assèchement, réussies ou non, par les Gallo-Romains. Leurs rives, en partie régularisées, rappellent parfois comment le travail des hommes et la politique de conquête de terres pour l’agriculture ont contribué à modifier les équilibres naturels.
Au fil des routes ou des chemins de terre, les paysages gardent encore la rectitude et, parfois même, le rythme qu’y a imprimé le quadrillage des cadastres romains que les aménageurs ont su adapter aux réalités des terrains. Ils ont largement déterminé la localisation des domaines, donné forme à bien des cœurs de village, comme à Vendres, ou orienté certaines limites communales comme à Colombiers, à Lespignan ou à Vendres encore.
Et les noms mêmes de plusieurs villages, qui n’étaient alors qu’une « villa » parmi les autres, comme ceux de nombreux domaines privés ou de lieux-dits, plus ou moins déformés par l’usage et le temps, rappellent toujours ceux des premiers propriétaires de ces fermes ou de ces « villas » qui ont dessiné, dès l’époque romaine, une carte de l’occupation du sol qui reste globalement actuelle. C’est ce que révèlent plus que d’autres les nombreux noms terminés en -an, de Lespignan, Nissan, Maureilhan et Maraussan, souvent perçus comme un premier signe d’identité culturelle du Midi.